DÉMARCHE ARTISTIQUE
Je m’intéresse au rapport entre visibilité et invisibilité. Dans ma démarche, j’utilise la lumière comme un moyen physique et métaphorique pour voir et donner à voir, au dehors et au dedans. Ce qui m’anime particulièrement c’est ce qui se joue entre ce que je vois et ce que je ne vois pas, et par extension la relation qu’entretient le conscient et l’inconscient. Mes recherches convoquent l’introspection, l’observation et l’expérience subjective, qui sont au fondement même de mon processus de création.
Mes œuvres sont construites comme des axes de réflexion, d’hypothèses et de démonstrations sur ce que peut être l'intériorité dans sa représentation et sa mise en présence dans un espace et un temps réels. Ce que je définis par intériorité, c’est cet espace-temps constant, infini, invisible, que l’on retrouve en soi-même, un monde en soi dans lequel on plonge et replonge sans cesse. Ma réflexion se rapproche de la définition suivante du philosophe Jan Patočka : « l’intériorité est le fondement originel même de l’existence, <…> elle est équivalente à l’existence »°. Je créé pour sonder et aller à la rencontre de l’existence, pour en extraire des formes, des schémas et des diagrammes. L’acte créateur me permet de donner une dimension à ce qui n’en a pas, des dimensions multiples, visant une forme de matérialité et d’universalité. La centralité est par conséquent un point d’ancrage dans mon travail, car il est question d’un positionnement par rapport à moi-même et au monde, sans cesse en mouvement. Je ne cherche pas à séparer mon être de mon travail, mais plutôt à faire corps, je créé pour recentrer, concentrer et rencontrer.
Pour cela, je poursuis principalement mes recherches sur papier, en revenant à une pratique plus spontanée et primitive comme le dessin associée au collage. J’utilise principalement des formes primaires comme le rond, le cercle, la ligne et le triangle, pour leurs caractéristiques à la fois plastiques, symboliques et spirituelles et une gamme colorée réduite composée de rouge et de doré, pour leurs propriétés physiques et lumineuses, ainsi que de blanc et de noir. Ces choix plastiques ont également des résonances avec l’art sacré et le minimalisme via l’utilisation d’éléments symboliques et synthétiques. La relation qu’entretient ces formes et ces couleurs avec la combinaison de ma pratique du dessin technique et du collage d’enfant créent un langage personnel que je développe sur le papier sous la forme de variations, de temps de poses, de pauses dans le mouvement. Aujourd’hui, pour des raisons pratiques, je travaille principalement en deux dimensions sur papier de petit format, mais je souhaite faire évoluer mes recherches en grand format, et aussi en trois, voire en quatre dimensions via d’autres médiums.
°Jan Patočka, Carnets philosophiques 1945-1950, traduit du tchèque et annoté par Erika Abrams, préface de Renaud Barbaras, Paris, Editions Vrin, 2021.
ARTIST STATEMENT
I am interested in the relationship between visibility and invisibility. In my practice, I use light as a physical and metaphorical way to see and show what is happening, outside and inside. What particularly drives me is what is at stake between what I see and what I don't see, and by extension, the very close relationship between consciousness and unconsciousness. My researches call for introspection, observation and subjective experience, which are at the very foundation of my creative process.
My series are built like a series of reflections, hypothesis and demonstrations on what interiority can be in its representation and its presence in real space and time. To do so, I use drawing to dig and meet what remains invisible, to extract shapes, patterns and diagrams. What I define by interiority is this infinite, deep, invisible space-time, which one finds in oneself, a world in oneself in which one plunges and plunges again unceasingly, in relation with philosopher Jan Patočka’s definition of interiority as « the very original ground of existence, <…> equivalent to existence ». The creative act allows me to give it a dimension and multiple dimensions, aiming for a form of materiality and universality. Centrality is therefore an anchor point in my work, because it is a question of positioning in relation to myself and to the world, which is constantly in motion. I do not want to separate my being from my work but evolve as one, I create to refocus, concentrate and encounter.
To do so, I mainly pursue my research on paper by returning to a spontaneous and primitive practice like drawing associated with collage. I mainly use primary shapes such as the round, the circle, the line and the triangle, for their plastic, symbolic and spiritual properties. My color palette is limited to red and gold, for their physical and luminous properties as well as black and white. These visual choices also have resonances with sacred and minimalist arts through the use of symbolic and synthetic elements. The relationship between these shapes and colors with the combination of my practice of technical drawing and children's collage create a personal language that I develop on paper in the form of variations, like exposure times or frozen movements. Nowadays, for practical reasons, I continue my research in two dimensions mostly by drawing on a small scale, but I would like my work to evolve on a bigger scale, furthermore in three, even in four dimensions by using other mediums and technics.